Je signe des deux mains

J’ai choisi de me rattacher à la religion catholique en un temps où il n’y a plus de religion. Pourquoi donc ? Il me semble que je me détraquerais tout si j’essayais de faire autrement. Est-ce manque de veine personnelle ou enchantement invincible, mes pensées, ma conception du monde, mes passions ne peuvent s’ordonner que selon les directions catholiques. Mais ne puis-je me passer d’ordre ? ou du moins quitter l’ordre que je connais pour me jeter à l’aventure et en gagner un autre ? Aussitôt que je m’écarte, je m’épouvante.

D’ailleurs les système catholique est si vaste, si complet que chacun peut y trouver son orientation particulière. Je sais bien tout ce qu’il y a de latitudinaire dans cette vue qui, avouée, serait condamnée et que c’est assez hypocrite de profiter, à l’ombre du catholicisme, d’une liberté d’en sortir qu’on n’y trouve de nos jours que parce qu’elle a été imposée du dehors.

Pierre Drieu La Rochelle, Blèche, Gallimard, L’Imaginaire, 2008, p. 105-106

Pas son meilleur roman, sans doute, mais j’ai rarement autant adhéré à une phrase de lui qu’à celle mise en gras plus haut. Au passage, comme je crois que tous les romans de l’ami Pierrot me sont maintenant passés entre les mains, le petit top 5 arbitraire qui va bien :

1) L’homme à cheval
2) Le feu follet
3) Mémoires de Dirk Raspe (inachevé, le meilleur s’il l’avait fini, j’imagine)
4) Gilles
5) Les chiens de paille

En bonus, cette citation (librement adaptée d’après mes souvenirs) de Mme X., professeur des universités, spécialiste de l’histoire du sentiment et de la sexualité, pas franchement à droite, et c’est peu dire : « Non, franchement, Drieu, en plus, ses romans ne valent rien ; alors que Brasillach… ». (Je dirais l’inverse, mais passons…).