L’Église en tant que chose sociale

« Ce qui me fait peur, c’est l’Église en tant que chose sociale. Non pas seulement à cause de ses souillures, mais du fait même qu’elle est entre autres caractères une chose sociale. Non pas que je sois d’un tempérament très individualiste. J’ai peur pour la raison contraire. J’ai en moi un fort penchant grégaire. je suis par disposition naturelle extrêmement influençable, influençable à l’excès, et surtout aux choses collectives. je sais que si j’avais devant moi en ce moment une vingtaine de jeunes Allemands chantant en chœur des chants nazis, une partie de mon âme deviendrait immédiatement nazie. C’est là une très grande faiblesse. Mais c’est ainsi que je suis. Je crois qu’il ne sert à rien de combattre directement les faiblesses naturelles. Il faut se faire violence pour agir comme si on ne les avait pas dans les circonstances où un devoir l’exige impérieusement ; et dans le cours ordinaire de la vie il faut bien les connaître, en tenir compte avec prudence, et s’efforcer d’en faire bon usage, car elles sont toutes susceptibles d’un bon usage.

J’ai peur de ce patriotisme de l’Église qui existe dans les milieux catholiques. J’entends patriotisme au sens du sentiment qu’on accorde à une patrie terrestre. J’en ai peur parce que j’ai peur de le contracter par contagion. Non pas que l’Église me paraisse indigne d’inspirer un tel sentiment. Mais parce que je ne veux pour moi d’aucun sentiment de ce genre. Le mot vouloir est impropre. Je sais, je sens avec certitude que tout sentiment de ce genre, quel qu’en soit l’objet, est funeste pour moi. »

Simone Weil, Attente de Dieu

En passant…

… juste une petite citation, vite fait, tout juste découverte.

Simone Weil : « l’intelligence a besoin d’une liberté complète, y compris celle de nier Dieu ; et par suite la religion a rapport à l’amour, pas à l’affirmation ou à la négation ».

J’ai trouvé ça dans un article de Basile de Koch sur Causeur… alors si quelqu’un peut me donner la source originale, je lui en serait infiniment reconnaissant. C’est peut-être dans La Pesanteur et la Grâce. Je suis content, parce que je disais plus ou moins la même chose il y a quelques temps, beaucoup moins bien et avec des longueurs.